Télérama n° 2873 - 4 février 2005
Philippe Barbot
Haut les filles,
haut les filles !
Marrantes, rentre-dedans ou douces-amères, elle débarquent
dans le monde un brin macho de la jeune chanson française. Et
elles n'ont pas froid aux yeux...
J'aime les filles
», chantait Dutronc au crépuscule des années 60.
Nous aussi. D'ailleurs, on trouvait qu'elles se faisaient un peu trop
discrètes dans le paysage de la « nouvelle chanson française
», éclipsées par les Bénabar, Delerm et autres
Sanseverino - horreur, rien que des mecs ! Depuis Clarika, Keren Ann,
Carla Bruni et La Grande Sophie, la relève féminine semblait
faire défaut, se réduisant à Jeanne Cherhal et
quelques autres. Pourtant, elles sont bien là, les émules
de Françoise Hardy ou de Véronique Sanson, mais encore
dans l'ombre. Comme si elles se préparaient en cachette à
envahir le paysage un tantinet machiste de la chanson française.
(....)
Chanter, c'est
vivre. Et vivre, ça n'est pas toujours facile. Zoé écrit
des chansons pour Daniel Lavoie ou Chimène Badi, en attendant
de trouver un contrat avec une maison de disques. Oshen cherche aussi
un label et multiplie les premières parties, de Brigitte Fontaine
à Jil Caplan. Anaïs, qui vient d'être sélectionnée
parmi les découvertes du Printemps de Bourges, va sortir un disque
autoproduit, enregistré en public. Et déjà d'autres
filles débarquent, toutes différentes dans le style mais
semblables dans la détermination. Barbara Carlotti, repérée
par Bertrand Burgalat. La Bretonne Orly Chap oeuvre dans la «
chanson rugueuse », façon Les Négresses Vertes ;
Caroline Thomas dans la goualante exotico-tendre, façon Les Escrocs.
Mell, chanteuse réaliste messine, menace d'être Les Têtes
Raides à elle seule ; Cristine conjugue harpe celtique et chanson
acide ; Marjolaine pose avec une moustache sur la pochette de son
disque et joue à être Calamity Jane armée d'un piano
à bretelles. Bref, la chanson est en train de se conjuguer
à nouveau au féminin. Pluriel, mais bien singulier.